Archives de catégorie : Première

Debussy et Verlaine

« Il pleure dans mon cœur » interprété par Barbara Hendricks (voix) et Michel Beroff (piano).


« Ariettes oubliées I » interprété par Barbara Hendricks (voix) et Michel Beroff (piano).

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Pour préparer l’entretien

Il est intéressant de noter que C. Debussy est confié pendant la guerre de 1870 à Antoinette Mauté de Fleurville, élève de Chopin et belle-mère de Verlaine. C’est elle qui le prépare au Conservatoire de Paris qu’il intègre en 1872. Il y étudiera le piano et composera ses premières mélodies en 1879 sur des textes d’Alfred de Musset (« Madrid », « Ballade à la lune »). Durant toute sa carrière, C. Debussy s’est attaché à explorer la relation entre la poésie et la musique. C’est en 1887 en s’installant à Paris qu’il commence à fréquenter les peintres impressionnistes et les poètes symbolistes tels que Verlaine (ses Mélodies sont composées à partir des Ariettes oubliées), Mallarmé (avec qui il se lance dans le projet théâtral autour du poème L’après-midi d’un faune) et Rimbaud.

Quelques éléments d’écoute musicale :

Ariettes oubliées I : on remarquera que la musique se fait discrète, elle prolonge simplement le texte poétique et le met en valeur. Le piano reste en retrait et accompagne délicatement la voix de la cantatrice soprano (voix de femme, la plus élevée des voix) qui passe de l’envolée lyrique au chuchotement plus intime.

Il pleure dans mon cœur : le piano mime la pluie régulière et s’oppose à la voix qui semble tourner sur elle-même en une sorte de danse lancinante pour suggérer un malaise, une obsession.

Ces éléments sont suffisants, il est improbable qu’on vous en demande davantage. L’objectif est de montrer que les notes musicales suggèrent tout autant que le jeu des sonorités du poème. Reprenez les éléments d’interprétation de votre lecture analytique et montrez que la musique permet de les mettre en relief. Il est également possible que l’examinateur cherche à connaitre vos impressions personnelles. Sentez-vous libre alors de développer votre sensibilité.

Traité sur la tolérance

Marc-Antoine Calas est retrouvé assassiné, son père Jean Calas est accusé du meurtre
Marc-Antoine Calas est retrouvé assassiné, son père Jean Calas est accusé du meurtre

Ce n’est donc plus aux hommes que je m’adresse ; c’est à toi, Dieu de tous les êtres, de tous les mondes et de tous les temps : s’il est permis à de faibles créatures perdues dans l’immensité, et imperceptibles au reste de l’univers, d’oser te demander quelque chose, à toi qui as tout donné, à toi dont les décrets sont immuables comme éternels, daigne regarder en pitié les erreurs attachées à notre nature ; que ces erreurs ne fassent point nos calamités. Tu ne nous as point donné un coeur pour nous haïr, et des mains pour nous égorger ; fais que nous nous aidions mutuellement à supporter le fardeau d’une vie pénible et passagère ; que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants, entre tous nos usages ridicules, entre toutes nos lois imparfaites, entre toutes nos opinions insensées, entre toutes nos conditions si disproportionnées à nos yeux, et si égales devant toi ; que toutes ces petites nuances qui distinguent les atomes appelés hommes ne soient pas des signaux de haine et de persécution ; que ceux qui allument des cierges en plein midi pour te célébrer supportent ceux qui se contentent de la lumière de ton soleil ; que ceux qui couvrent leur robe d’une toile blanche pour dire qu’il faut t’aimer ne détestent pas ceux qui disent la même chose sous un manteau de laine noire ; qu’il soit égal de t’adorer dans un jargon formé d’une ancienne langue, ou dans un jargon plus nouveau ; que ceux dont l’habit est teint en rouge ou en violet, qui dominent sur une petite parcelle d’un petit tas de la boue de ce monde, et qui possèdent quelques fragments arrondis d’un certain métal, jouissent sans orgueil de ce qu’ils appellent grandeur et richesse, et que les autres les voient sans envie : car tu sais qu’il n’y a dans ces vanités ni de quoi envier, ni de quoi s’enorgueillir.

Puissent tous les hommes se souvenir qu’ils sont frères ! Qu’ils aient en horreur la tyrannie exercée sur les âmes, comme ils ont en exécration le brigandage qui ravit par la force le fruit du travail et de l’industrie paisible ! Si les fléaux de la guerre sont inévitables, ne nous haïssons pas, ne nous déchirons pas les uns les autres dans le sein de la paix, et employons l’instant de notre existence à bénir également en mille langages divers, depuis Siam jusqu’à la Californie, ta bonté qui nous a donné cet instant.

 Voltaire, Traité sur la tolérance, 1763.